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lundi 21 avril 2014

Sans crâne et sans sommeil.


Observer plus longuement les volutes insensées de la fumée d'une cigarette. Etre plus attentif au son infiniment complexe de cette pluie s'écrasant sur cette vitre, à cette hauteur, de cette pièce. Sentir le frôlement d'un bras aussi fort que l'impact d'un tracteur. Rencontrer pour la première fois la texture d'un tissus que tu portes tous les jours. Être un appareil sensoriel. Un court instant, reconnaitre l'odeur d'une époque que tu n'as pas connu, les effluves d'un lieu qui n'est pas celui-ci. Mettre l'ailleurs ici et le maintenant plus tard. Dans une gorgée d'eau trouver le gout d'un arbre, d'une terre, d'une pierre. Les instants rares, les instants précieux ne s'allument qu'une microseconde, tout est si minuscule, insolent, invisible. Faire de son regard un muscle, de sa peau un volcan, de sa fatigue une énergie. Donner à un murmure toute la puissance d'un hurlement, à une odeur la consistance d'un mur, à un visage toute l'attention du monde. Et trainer son âme grande ouverte dans chaque point, chaque virgule. Conjuguer le verbe être avec une majuscule.  

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