Les lieux sont l'exacte opposé des
personnes. Les bâtiments n'ont pas, derrière leurs murs, de pensées
insondables ou de regards moqueurs. Les baraques n'ont peur de rien,
les buildings n'ont pas d'égo, et aucun sous-sol ne se sous-estime.
Un lieu, un espace ne vous abandonne pas pour déplacer sa masse
ailleurs. Vous effleurez le relief poreux de ses briques, vous ne lui
ferez jamais de mal, votre souffle se perd sur l'arrête de chaque
angle, vous pouvez l'aimer à en perdre haleine, le laisser pourrir
ou le sublimer peu importe. C'est bien connu : les murs, les sols et
les plafonds ne pleurent jamais.
Les lieux ne font pas de promesse, ils
n'attendent rien de vous pourtant ils vous attendent. Vous pouvez
quitter un espace, le retrouver douze ans plus tard, rien d'autre
n'aura coulé sous leurs ponts que du temps, pas de larmes pas de
sang.
Parfois ils vous ressemblent : Leurs
corps dégingandés, leurs salles trop vides, trop pleines, leurs
orifices absurdes et leur toit poussiéreux vous rappelle vaguement
vos organes. Mais quand tout disparait, quand rien n'est plus
palpable autour de vous que l'odeur du chaos, vous reposez la
courbure de votre âme contre quelque chose de solide. C'est toujours
un mur et c'est toujours un lieu.
Il est seize heure et votre peau colle
au granit de cet espace, de votre sueur en orbite vous sentez
désormais la masse. C'est le monde des hommes qui vous quitte quand
celui des briques vous enlace.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire